par Jérôme
le 19 août 2014 à 10:49
En mai dernier, sur la Croisette, le nouveau film d'Olivier Assayas, Sils Maria fut présenté le tout dernier jour du festival. Ce mercredi 20 Août, le film sort sur nos écrans et nous sommes heureux de revenir aujourd'hui, avec moins de fatigue qu'en mai dernier et plus de recul, sur les nombreux charmes de ce film singulier, véritable déclaration d'amour aux actrices sur fond de mises en abymes de la carrière d'actrice.
Car en plus d'un casting franco-américain 5 étoiles (Juliette Binoche, Kristen Stewart et Chloé Grace Moretz), la mise en scène du monde du spectacle de Sils Maria est aussi inspirée que fascinante. Il faut dire qu'Olivier Assayas a longtemps été marié à une actrice (n.d.l.r Maggie Cheung qui reçut le prix d'interprétation féminine à Cannes en 2004 pour Clean d'Olivier Assayas). Le réalisateur a également été présent 6 fois à Cannes dont 3 films (Les destinées sentimentales, Demonlover et Clean donc) en compétition officielle et hors compétition avec Carlos et Boarding Gate.
Plusieurs semaines se sont écoulées depuis Cannes, et nous sommes ravis de constater que de nombreuses images de Sils Maria nous restent toujours en mémoire. A l'issue du festival, nous rêvions même de voir un double prix d'interprétation accordé à Juliette Binoche et à Kristen Stewart…
Sils Maria raconte l'histoire de l'actrice Maria (interprétée donc par Juliette Binoche plus naturelle que jamais) qui connut un succès fulgurant à 18 ans en incarnant le rôle de Sigrid, une charmante jeune fille qui poussa au suicide une femme mûre, Helena. Vingt ans plus tard, à l'apogée de sa gloire, elle reçoit à Zurich un prix prestigieux au nom de l'auteur et metteur en scène de la pièce (Wilheim Melchior) qui, quelques heures avant la cérémonie, meurt subitement. Maria va se voir proposer cette pièce, mais cette fois de l'autre côté du miroir : dans le rôle d'Helena…
L'assistante de Maria, Valentine (interprétée par une incroyable Kristen Stewart elle aussi d'un naturel saisissant) accompagne l'actrice dans les Alpes suisses (à Sils Maria donc) pour répéter la pièce. Alors que les scènes se succèdent, réalité et théâtre se mélangent tant et si bien que le doute de Maria envahit le spectateur pour mieux le perdre dans les méandres des nuages glissant sur les cimes Alpines. Le scénario emprunte alors un délicieux labyrinthe : le choix des actrices, aussi bien celui de la renommée et talentueuse Juliette Binoche face à la jeunesse montante incarnée par Kristen Stewart mais aussi Chloé Grace Moretz apparait alors comme une redoutable figure de style.
A ce bal des actrices exquis, Olivier Assayas ajoute de belles digressions narratives grâce à des procédés de mise en abymes des plus originaux: par exemple, il filme le phénomène météorologique extraordinaire du serpent de Maloja (observable en plein jour par des vents de nuit à courant descendants !) tout en mettant en scène un authentique film de montagne original réalisé par l'alpiniste Arnold Franck dans les années 20.
Enfin, la bande originale du film finit de nous troubler en alternant morceaux classiques et contemporains. Et si l'on vous dit précisément que l'un des titres employés par Olivier Assayas dans Sils Maria (« Can't go back » exactement) fut également utilisé dans la bande son du film Kick Ass dans lequel fut révélée Chloe Grace Moretz, là vous vous dîtes comme nous qu'on atteint effectivement des sommets vertigineux !.
Il y a de grandes chances qu'après Sils Maria , vous ne voyez plus ni Juliette Binoche ni Kristen Stewart de la même manière : leurs talents réciproques à ces stades différents de leurs carrières impriment les rétines. A y regarder de plus près, après Welcome to the Rileys, ou encore Sur la Route , Kristen Stewart, du haut de ses 24 ans, s'auréole d'une filmographie dans laquelle les films de la saga Twilight apparaissent presque comme des incohérences au milieu de tant de films singuliers. Quant à Juliette Binoche, les talents de la grande actrice nous furent révélés dans le film Rendez-vous d'André Téchiné en 1984. Le scénario était alors co-écrit par Olivier Assayas et André Téchiné. Le film était lui aussi une mise en abyme de la carrière d'actrice….Et Juliette Binoche avait alors tout juste 20 ans !
Citons les mots du réalisateur avant de vous laisser aller découvrir le films en salles: « C'est Juliette qui, la première, a eu l'intuition qu'il y avait dans notre histoire commune une opportunité manquée, ou plutôt un film, resté virtuel et qui renverrait pour l'un comme pour l'autre à l'essentiel. C'est porté par cette même intuition que j'ai commencé à prendre des notes, puis à donner forme à des personnages, à un récit, qui attendaient depuis longtemps d'exister. L'écriture est un chemin, celui-ci tient au vertige, celui du temps, suspendu entre l'origine et le devenir ; pas étonnant qu'il m'ait inspiré des paysages de montagnes, des sentiers escarpés. Qu'il y ait à la fois la lumière du printemps, la transparence de l'air et les brumes du passé, celles du phénomène nuageux de Maloja. Un chemin qui à la fois me ramenait là où tout commence, pour Juliette comme pour moi, et puis là où aujourd'hui nous pouvons nous retrouver, dans l'interrogation du présent, et surtout dans celle du futur. »
La boucle est bouclée…
Vous ne comprenez plus rien à ce que nous essayons de vous dire? Ce n'est pas grave…laissez-vous emporter par la valse ! Et revenez-nous relire pour nous confier vos impressions après la projection. Bon séjour à Sils Maria !
Emmené par des actrices étincelantes et prodigieuses, en parfaite communion avec leur réalisateur, SILS MARIA construit un récit complexe mais passionnant, et dessine le portrait de femmes de générations différentes ...
http://gowith-theblog.com/critique-sils-maria-kristen-stewart
Rédigé par : Elle | jeudi 21 août 2014 à 05:34