par Olivier
le 25 avril 2013 à 18:38
La conférence de presse
Jeudi dernier a eu lieu la traditionnelle conférence de presse de Gilles Jacob et Thierry Frémaux, respectivement Président et Délégué Général du Festival de Cannes s'il fallait le rappeler. Les 2 hommes forts de Cannes sont parfaitement rodés pour cet exercice de style dont le déroulement bien huilé semble immuable : le premier ouvre la conférence avec son « mot du Président » pendant 5-10 mn, et le second présente la liste des films qu'il a retenu en sélection officielle, en finissant par la Compétition histoire de ménager le suspense.
Un changement dans la tradition
Un changement notable est cependant à signaler cette année dans la « tradition » : le lieu. La conférence s'est en effet déroulée dans la grande salle de l'UGC Normandie, sur les Champs Elysées, et non au Grand Hôtel comme ce fût le cas pendant de nombreuses années. Ce n'est certes pas une première (la conférence a déjà eu lieu au Gaumont des mêmes Champs Elysées), mais on s'était habitué au prestige, au luxe du Grand Hôtel (souvenez-vous de la conférence de presse 2011 , et de la vidéo de la conférence de presse 2012 ). J'ai cru un moment à une projection de bandes annonces ou d' extraits justifiant le changement de lieu. Mais non, juste la projection de la petite vidéo d'animation de l'affiche officielle :
Oui la salle est plus grande que celle du Grand Hôtel (pour une présence plus importante des médias ?), oui les fauteuils sont plus larges et confortables que les chaises de l' Intercontinental, mais alors côté réception réseau… c'est archi pourri ! Vous me direz, ce n'est pas dans une salle de ciné que l'on s'attend à capter le mieux. Je vous l'accorde.
Pas de réseau !
Dans la salle 1 de l'UGC, que du Edge, pas de 3G. Autant vous dire que dans ces conditions de l'âge de pierre smartphonien, ce fût l'horreur pour le Live Tweet promis ! Si au début de la conférence j'arrivais difficilement à envoyer mes tweets (mais au moins ils partaient), lorsque Thierry Frémaux est arrivé à la liste des films en compétition, ce fût le black-out ! Tout le monde dans la salle essayait de Tweeter, d' envoyer des mails, de poster des articles… Bilan : réseau engorgé, complètement saturé. Rien ne pouvait être envoyé. Plus rien. Que dalle. Nada. Walou. Bref, c'était comme envoyer des SMS le 31 décembre à minuit. Mais avec des tweets, et en plein mois d'avril.
Ne me laissant pas abattre, c'est avec une dextérité que je ne (me) soupçonnais pas, que je tweetais aussi vite que possible les films en compétition (tout en sachant que l'envoi des tweets planterait). Plus vite en tout cas que l'apparition des messages d'erreurs des tweets précédents, tweets que je m'empressais de renvoyer immédiatement tout en sachant qu'ils ne passeraient pas d'avantage. Bilan des courses ? Une tendinite des 2 pouces, et aucun tweet sur la compétition envoyé. Pour être précis, aucun tweet n'a réussi à quitter l'UGC… avant que je ne quitte moi-même l'UGC. Bref, c'est sympa le "Live Postponed tweet" sur les Champs Elysées. En tout cas c'est un nouveau concept que personne n'a voulu me piquer. Vous voulez savoir à qui je ressemblais à ce moment-là ? Et bien voila…
Bref, vivement un retour au Grand Hotel en 2014 !
Le mot du président
Je vous l'ai dit, le rendez-vous annuel Parisien du Festival de Cannes commence toujours pas le « mot du Président ». Le passage qui m'a le plus marqué est celui où Gilles Jacob parle du Festival comme « la maison où viennent s' abriter les artistes en danger ». Pour en savoir plus, vous pouvez lire le discours disponible en intégralité ici .
La sélection
Une « Croisette joyeuse, généreuse, comme la sélection pleine d'auteurs, de cinéma, de découvertes, de surprises même, et de stars ». Voici la promesse de Thierry Frémaux dans son introduction, ajoutant que « Dans la sélection que l'on va dévoiler, vous allez trouver des gens dont la présence vous surprendra, d'autres gens dont la présence vous rassurera. Des cinéastes qui viennent pour la première fois en sélection officielle ou en compétition, et des cinéastes qui viennent depuis longtemps ». Quant au mythe de la sélection bouclée dans la nuit précédente, et bien sachez que 2 films sélectionnés en compétition n'ont été vus que 48h avant l'annonce : Nebraska de Alexander Payne et La vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche.
Steven Spielberg très impliqué
Le futur président du Jury s'est senti très impliqué dans le choix des films pendant la phase de sélection. Au point pour Thierry Frémaux de sentir la tête du metteur en scène « au-dessus de son épaule », à coup de « Ah oui oui prends ça… Non ne prends pas çà… ». Si le délégué général est le seul décideur de la sélection, je pense qu'il n'a pas dû être simple pour Thierry Frémaux de dire non à Spielberg !
« Les grands auteurs font les grands films »
Avant d'annoncer la liste des films, Thierry Frémaux a lui-même désamorcé la critique « de s'entendre dire après chaque présentation de sélection : il y a quand même beaucoup ''d'habitués'' ». La précision « On n'aime pas beaucoup le terme ''d'habitué'', on aime les cinéastes supposés ''habitués'' » nous a amené tout droit vers ce qui est probablement la réplique culte - presque un slogan - du Délégué Général (je vous en parlais en 2011 ) : « Les grands auteurs font les grands films ».
''C'est pas faux'', dirait sans doute Karadoc dans Kaamelott ! « Pourquoi se priverait-on, au nom du supposé renouvellement permanent, de ces auteurs ? ». La réponse étant évidemment dans la question, voilà pourquoi « nous retrouverons avec plaisir un certain nombre de gens qui vont venir donner de leurs nouvelles sur le plan artistique, et donner à travers leur film des nouvelles du cinéma mondial ».
Les rumeurs et les absents
La prise de parole de Thierry Frémaux (après le discours de Gilles Jacob) signe le coup d'envoi de la partie annuelle de « Loto Bingo » où chaque participant attend fébrilement l'annonce des films de sa propre sélection idéale. « Le jeu des rumeurs est un jeu qui même nous nous amuse », commente Thierry Frémaux, ne pouvant s'empêcher d'ajouter avec un sourire « On apprend parfois même des trucs » !
Les cinéastes mentionnés dans les « gazettes » (sic) que l'on ne retrouve pas en sélection ne sont pas forcement de gens qui ont été refusés. Mais tout simplement « que leur film n'était pas prêt et qu'il n'a donc pas été question de sélectionner ». Parmi les absences notables, je retiendrai personnellement Knight of Cups de Terrence Malick avec Christian Bale et Natalie Portman, et Nymphomaniac films en 2 volets de Lars Von Trier. Mais pour ce dernier, nous savions depuis une annonce en marge du Festival de Berlin qu'aucun de ses 2 films ne seraient prêts à temps pour Cannes.
Thierry Frémaux, sans citer de noms, a également confié à l'AFP regretter le refus de certains metteurs en scène de ne pas faire partie de la sélection s'ils n'étaient pas en Compétition. Difficile de ne pas songer au Congrès d'Ari Folman ( Valse avec Bachir, en compétition en 2008) qui fera cette année l'ouverture de la Quinzaine des réalisateurs.
Une seule femme en compétition
Vous vous en souvenez probablement, l'an passé la Compétition n'était composée que films réalisés par des metteurs en scènes « hommes ». Il n'en fallait pas moins pour que Thierry Frémaux soit attaqué de toute part par les féministes. Avec une seule femme en Compétition cette année (Valérie Bruni Tedeschi avec Un château en Italie), la question fût donc posée à Thierry Frémaux de savoir s'il avait tenu compte de la polémique pour la sélection 2013.
La réponse fût en substance la même que l'année dernière : « Les œuvres que vous aurez sous les yeux, bientôt, sont des œuvres faites par des artistes et par des cinéastes dont a priori nous ne préjugeons pas de leurs qualités selon qu'elles sont réalisées par des hommes ou par des femmes ».
Pour ma part, je soutiens la ligne de Thierry Frémaux. La mise en place de quotas, c'est la porte ouverte à toutes les fenêtres comme dirait Gad Elmaleh. Si l'on accepte la mise en place d'un quota homme/femme, que répondre à de jeunes réalisateurs (Xavier Dolan par exemple) qui demanderaient des quotas jeune/vieux ? Et pourquoi les Iles Féroé ne réclameraient-elles pas à leur tour des quotas par pays ? Seule la « qualité » du film doit compter même si, j'en conviens, celà reste un critère subjectif, contestable et donc contesté.
Les anecdotes
Pour moi qui ai eu la chance de participer aux 3 dernières conférences de presse du Festival, je peux témoigner que ce n'est vraiment pas la même de chose de découvrir la sélection officielle d'un coup dans les médias, et découvrir la sélection « en live », film par film. Pourquoi ? Parce que cela permet de savourer unitairement l'annonce de chaque film (et le marquage de point au « Loto Bingo » si vous suivez), mais surtout cela permet de connaître toutes les petites anecdotes de Thierry Frémaux, dont je ne peux m'empêcher de vous rapporter certaines d'entre elles :
Nous avons appris que les frères Coen (Palme d'or 1991 pour Barton Fink, et à 2 doigts de la palme d'or en 2007 pour No Country For Old Men) seraient contents de retrouver leur « oncle Gilles » puisque c'est comme ça qu'ils appellent Gilles Jacob.
A propos du film Jimmy P. d'Arnaud Desplechin avec Mathieu Amalric et Benicio Del Toro, Thierry Frémaux raconte avoir reçu un SMS du célèbre acteur Porto-Ricain la nuit précédant l'annonce, lui demandant s'il devait racheter un smoking ! La réponse est oui.
Quant à la sélection de Behind The Candelabra avec Matt Damon et Michael Douglas, le Délégué Général nous apprend que « Steven Soderbergh voulait être hors compétition au début lorsque l'on a vu son film il y a très longtemps, et puis on l' a convaincu de venir en compétition d'abord pour la qualité de son travail et aussi parce qu'il a annoncé que ce serait son dernier film (…) Or son premier film est venu à Cannes : c'était Sexe, mensonges et vidéo, et il a gagné la Palme d' or. Nous lui souhaitons donc la même fortune avec ce film (…) Steven est réputé pour faire des mails extrêmement laconiques. Je lui ai fait un long mail pour les donner les bonnes raisons que nous avions de l'inviter en compétition et mon mail se terminait par 'Say Yes', et sa réponse fût… 'Yes' »
Only God Forgives, le très attendu film de Nicolas Winding Refn ( Drive) refaisant équipe avec Ryan Gosling a été qualifié de « film radical et punk de cette sélection » tout en précisant que nous ne devions pas nous attendre à un Drive 2 !
« Annonce bien que je suis polonais ! » a demandé Roman Polanski à Thierry Frémaux. Le réalisateur, qui concourra pour la palme d'or 2013 avec La Vénus à la fourrure, se retrouve en effet dans la même situation que Michael Haneke et son Amour l'an passé (une œuvre française par un réalisateur autrichien). « Dire quelle est la nationalité d'un film est de plus en plus difficile ».
Concernant The immigrant, le nouveau nom du film de James Gray connu jusqu'alors sous le titre Low Life, Thierry Frémaux n'a pu s'empêcher de taquiner la presse : « Nous verrons avec James Gray si la tradition de sa présence à Cannes sera la même que d'habitude, c'est à dire un film accueilli à Cannes de façon partagée et grand succès lors de sa sortie en salle ».
Enfin, nous aurons 2 Gatsby pour le prix d'un, puisqu'outre la présence de Léonardo Di Caprio en ouverture du Festival pour le Gatsby le magnifique version 2013 par Baz Luhrmann, Robert Redford ( Gatsby le magnifique version 1974) sera également présent sur la Croisette pour All Is Lost, le nouveau film de J.C. Chandor à qui l'on doit l'excellent Margin Call.
Les chiffres
Pour ceux préférant les chiffres aux lettres, la sélection Cannoise 2013 c' est...
1858 films soumis cette année, contre 1779 l'année dernière, et 1670 en 2009.
100 films dignes de la considération du Festival, pour seulement 50 à 60 films retenus en sélection officielle
Spécifiquement pour la compétition :
19 films à ce jour, ce qui laisse une porte ouverte pour un ou 2 films de plus, ou la bascule d'un film hors compétition en compétition comme ce fût le cas pour The Artist il y a 2 ans.
5 films de réalisateurs français : Un château en Italie de Valeria Bruni-Tedeschi, Jeune et jolie de François Ozon, La vie d'Adèle de Abdellatif Kechiche, Jimmy P. de Arnaud Desplechin, Michael Kohlhaas de Arnaud des Pallières.
2 autres films francophones : La Vénus à la fourrure de Roman Polanski (réalisateur polonais donc) avec Emmanuelle Seigner et Mathieu Amalric, et Le Passé d' Asghar Farhadi (réalisateur iranien) avec Bérénice Béjo et Tahar Rahim.
4 films de réalisateurs américains (l'effet Spielberg ?) : Inside Llewyn Davis de Ethan Coen et Joel Coen, The Immigrant de James Gray, Behind The Candelabra de Steven Soderbergh, Nebraska de Alexander Payne
1 seule femme en compétition, Valérie Bruni Tedeschi pour Un château en Italie.
C lumineux comme d'hab ! MERCI et JOYEUX ANNIVERSAIRE Jérôme !
Rédigé par : Mireille | vendredi 26 avril 2013 à 08:58
Double Mega-MERCI Mireille pour ton adorable message!! :-) Des bises!
Rédigé par : Jerome | vendredi 26 avril 2013 à 10:20